« Avec Un Kurde à Ithaque, l’écrivain d’origine kurde Fawaz Hussain signe un puissant récit initiatique sur le thème universel de l’errance et de l’exil. S’inscrivant dans la veine des grands textes homériques, ce roman captivant relate le périple intérieur d’un réfugié kurde, de Paris à la Grèce, sur les traces du mythique Ulysse. Dès les premières pages, le lecteur est saisi par une plume envoûtante qui l’embarque dans un voyage aux résonances intimes et universelles. Avec sensibilité et empathie, Fawaz Hussain tisse la trame d’une odyssée moderne, portée par un souffle épique. Son style sensible fait vivre les errances d’un peuple déraciné, tout en explorant les méandres de l’âme humaine.
À travers son personnage de réfugié hanté par le passé, amoureux de la belle Chirine, enlevée si tôt par la “mort tombée du ciel” dans une petite ville qui se mue en tableau dantesque, Fawaz Hussain aborde avec pudeur le lourd tribut payé par les Kurdes irakiens sous le régime de Saddam Hussein. L’auteur, qui connaît cette tragédie dans sa chair, évoque le martyre de Halabja, ville anéantie en 1988 par des bombardements chimiques. Cet acte génocidaire, qui fit des milliers de victimes kurdes, demeure un tabou que l’écrivain exhume avec justesse. De même, il rappelle la déportation massive de Kurdes lors de l’Anfal, cette sombre campagne de la fin des années 1980. Autant d’atrocités infligées à un peuple pris entre plusieurs feux, dont le récit poignant affleure en filigrane dans le périple du personnage. Derrière les errances de Farhad se dessine le destin tragique du Kurdistan irakien, que Fawaz Hussain, né dans le Nord-Est de la Syrie, connaît intimement.
Mêlant habilement récits de voyage, réminiscences historiques et élans poétiques, Fawaz Hussain signe une ode vibrante à la résilience d’un peuple déraciné. Son style sensuel fait vivre au lecteur l’atmosphère unique de ces escales en Grèce, entre ruines antiques et embruns marins. On suit avec empathie la quête initiatique du personnage, balloté entre passé et présent, Orient et Occident, depuis les brumes de l’exil parisien jusqu’à la lumière de la mythique Ithaque. Sous la houlette bienveillante de Calliope, mystérieuse passeuse qui l’encourage à prendre la route, Farhad entame une quête de soi aux résonances universelles. Marchant dans les pas du légendaire Ulysse dont il foule le berceau, confronté aux figures tutélaires de Cavafy, Khayyâm ou Rûmî, il se fraie un chemin vers la connaissance à travers maints détours géographiques et spirituels.
Objet symbolique aux résonances intimes, le cahier confié par Calliope à Farhad revêt une importance capitale dans l’architecture du roman. Bien plus qu’un simple carnet de voyage, il représente la promesse d’un cheminement intérieur, d’une métamorphose existentielle.
D’emblée, ce cadeau chargé de mystère éveille la curiosité du lecteur, intervenant comme un élément déclencheur du périple à venir... »
La suite de la chronique de Jean-Jacques Bedu est à lire sur le blog littéraire Mare Nostrum