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Arkan Simaan nous offre ici un récit autobiographique très vivant et d’un vif intérêt, centré sur les déracinements successifs qu’a connu cet homme qui, sans aucunement renier ses racines arabes moyen-orientales, exprime son amour profond pour le Brésil où il a grandi mais où il fut aussi persécuté, de même que pour la France qui l’a ensuite accueilli et à la culture de laquelle il s’est résolument assimilé, sans omettre son attachement pour l’Algérie où il a exercé des fonctions d’enseignant au titre de la coopération. En authentique citoyen du monde, notre auteur témoigne de la possibilité d’endosser une identité plurielle, sans déchirement, sans assignation à une origine ni reniement d’aucune sorte, mais au prix d’un effort renouvelé d’adaptation et d’intégration, nourri par une ouverture constante à la culture des autres et par une volonté de compréhension sans préjugés.
Le sous-titre de ce témoignage attachant et stimulant, Immigration – Dictature – Exil, suggère assez les nombreuses épreuves qu’Arkan Simaan, mais aussi sa famille et ses proches, ont dû cependant subir au fil de ce parcours de vie. Mais l’un des charmes de cet ouvrage tient à l’habileté avec laquelle se trouvent intriqués les souvenirs de gêne matérielle, d’angoisse et de lutte d’une part, et quantité d’anecdotes pittoresques, souriantes ou émouvantes d’autre part. L’unité de l’ensemble est fermement assurée par l’engagement tenace et courageux de notre témoin pour les hautes valeurs de justice et de fraternité, servies au milieu des dangers par son engagement politique actif, en tant qu’étudiant, contre l’oppression du régime militaire brésilien, mais également incarnées tout au long des innombrables rencontres et situations vécues dans les décennies suivantes, en France comme en Algérie, et jusqu’à aujourd’hui au service de la défense des milieux naturels de son cher Brésil et de ses peuples autochtones.
On ne peut donc que recommander la lecture de ce récit qui a le mérite de ne jamais verser dans la lamentation nostalgique ni dans la prédication militante, politique ni morale, mais propose le simple témoignage en actes d’une très haute conscience de notre humanité commune, qui illustre remarquablement le célèbre propos de Montaigne : « Chaque homme porte la forme entière de l’humaine condition. » (Essais, Livre III chapitre 2 : « Du repentir ».)
Yves M.
Professeur agrégé de Lettres
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